
Les 30 000 cailloux à Ribérac
23 juillet 2023 par Hélène Le Cheviller
C’est la ville de Ribérac en Dordogne qui a accueilli dans sa Collégiale la première exposition déployant le dispositif multimédia des 30 000 cailloux pour le consul.
Après une première série de dessins accrochés en longues lignes, étaient projetés les 30 000 cailloux, chacun étant montré durant 5, 77 secondes, pour que la totalité des images soit visible sur trois jours.
Un espace atelier permettait aux visiteurs de laisser une trace de leur passage en dessinant et en dédicaçant des cailloux à d’autres personnes que le consul, sauveteurs d’hier ou d’aujourd’hui.
Le visiteur pouvait ensuite déclencher le film d’animation, projeté sur un voile dans le chœur de la Collégiale.
Un deuxième grand mur présentait des dessins de cailloux par thème : abstraits, hyperréalistes, visages, regards… avant de mener à un écran présentant les capsules sonores d’Estelle Coquin.
Enfin, un espace était réservé à la diffusion au casque du documentaire sonore.
Lors du vernissage, les 30 000 images étaient présentes, rangées dans une vingtaine de boites en bois. A l’aide de dés, les visiteurs ont pu tirer des numéros de dessins, et les accrocher sur un mur réservé dans cet but, traduisant le « destin » de ceux qui ont pu être sauvés.
Le 17 juin, le dispositif a été enrichi des belles rencontres et prises de paroles.
Jacques Ranoux a présenté un livre sur ses parents, résistants en Dordogne durant la seconde guerre mondiale. Le titre du livre renvoie à leurs noms de guerre, « Hercule et Claude ».
Le philosophe Serge Added a ensuite animé une table ronde sur le thème « Catastrophes et solidarités font elles toujours bon ménage? ».
La Collégiale fut un écrin de choix pour cette première présentation. Elle a pris plus de sens encore grâce à la présence sur place de Marie-Rose Faure, dernière fille du Consul, qui fut élevée à Ribérac dans les années quarante. Elle conserve toujours la maison familiale, qui porte maintenant une plaque en hommage au consul et a laissé son témoignage à l’entrée du site.
« Remerciements de Marie-Rose Sousa Mendes, dernière fille du consul Aristides Sousa Mendes, lors de l’exposition 30000 cailloux pour le consul réalisée par LN Le Cheviller (artiste peintre) et Estelle Coquin (créatrice sonore) à la Collégiale Notre-Dame de Ribérac.
Chers visiteurs,
Je suis très touchée par cette initiative de faire revivre l’acte héroïque de mon père à Ribérac. En effet, j’ai vécu dans cette petite ville depuis mon plus jeune âge. Dans le contexte du conflit de la seconde guerre mondiale et de ses conséquences sur la situation professionnelle de mon père, j’ai été élevée dans la famille de ma mère, originaire du Périgord.
Ce n’est qu’à partir de 1950 que j’ai pu faire la connaissance d’Aristides, alors que le dictateur du Portugal, Antonio de Oliveira Salazar, l’avait autorisé à quitter son pays pour une courte période. Quatre années de suite, j’ai donc eu le bonheur de passer un mois en compagnie de mes parents à Ribérac. Je me souviens de l’arrivée de mon père sur le pas de la porte de la maison où je vivais avec mon grand-oncle et ma grand-tante. J’ai été particulièrement impressionnée par cet homme rayonnant de joie alors que j’allais à sa rencontre. J’attendais avec impatience de le présenter à mes camarades de collège avec qui il aimait sympathiser. Il m’est donc apparu comme un homme profondément humain, tel que l’était aussi mon grand-oncle René Parcellier, qui avait participé à la résistance pendant la seconde guerre mondiale. D’ailleurs leurs conversations me semblaient, du haut de mes dix ans, évoquer des opinions semblables sur des sujets importants et sérieux, portant sans nul doute sur l’extrême nécessité de sauver des vies.
Vous comprendrez donc, chers visiteurs, combien je suis heureuse et profondément émue de savoir qu’à Ribérac, l’acte de sauvetage de mon père ait pu être mis en scène dans l’exposition que vous découvrez. »